Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le blog de la famille
Visiteurs
Depuis la création 13 626
Derniers commentaires
Archives
2 octobre 2009

District 9 de Neill Blomkamp

District9Mon avis : Je n'ai pas été déçu, 2 heures de bonheur.

Télérama

 

RÉSUMÉ DU FILM 

FANTASTIQUE - Il y a trente ans, des extraterrestres entrèrent en contact avec la Terre... Au lieu d'attaquer les humains, ces visiteurs d'au-delà des étoiles étaient des réfugiés, les derniers survivants de leur monde. Ils furent temporairement installés dans le District 9, en Afrique du Sud, pendant que les nations du monde se querellaient pour savoir quoi en faire. La tension entre extraterrestres et humains atteint son maximum lorsqu'un agent de terrain du MNU, contracte un mystérieux virus qui se met à modifier son ADN...

CRITIQUE

Un régal pour un fan de science-fiction : un vaisseau extraterrestre s'arrête au-dessus de Johannesburg. Dans ses cales, des milliers d'aliens en piteux état. Survivants d'une race en voie d'extinction ? Clandestins qu'on a expédiés sans espoir de retour à l'autre bout de la Voie lactée ? Vingt ans passent durant lesquels ces drôles d'êtres vaguement humanoïdes, dont l'allure évoque insectes ou crustacés, sont parqués dans le District 9. Un ghetto cradingue, repaire de criminels, et désormais surpeuplé. Un malheureux fonctionnaire est chargé d'organiser le déplacement vers le District 10, un camp de rétention à peine plus hospitalier...

Le filmage caméra à l'épaule, faux reportage avec interviews de témoins, rend l'extraordinaire résolument ordinaire. La description de ce no man's land sauvage, siège de l'altérité la plus radicale, est saisissante. Même le détail le plus farfelu fait vrai, à commencer par l'amour immodéré des « crevettes » – le surnom courant des aliens – pour la nourriture pour chats et le caoutchouc des pneus...

En Afrique du Sud, où l'apartheid sévissait encore il n'y a pas si longtemps, la confrontation d'un humain très ordinaire – l'agent de terrain Wikus Van der Merwe – avec une population parquée et méprisée prend évidemment une dimension symbolique supplémentaire. Mais le film évoque plus largement le sort réservé aux clandestins (un Welcome S-F ?), ou les rapports Nord-Sud. Le parcours du personnage principal s'apparente à une rédemption classique : il se transforme peu à peu auprès de ceux qu'il était censé rudoyer. La mutation est également physique, qui tire vers le « gore »...

Ce premier film bourré d'idées, produit par Peter Jackson (le metteur en scène du Seigneur des anneaux et de King Kong), réussit un tour de force : son héros le plus attachant n'est pas l'Afrikaner borné qui apprend tardivement les vertus de la désobéissance civile, mais une drôle de bébête inconnue, dotée d'un langage caquetant et d'un exosquelette rutilant.

Aurélien Ferenczi

Télérama, Samedi 19 septembre 2009



Les Inrocks

Par O.Joyard - JM.Lalanne

Un vaisseau d’extraterrestres échoué au-dessus de l’Afrique du Sud… Des aliens, ou plutôt des “crevettes” d’un mètre quatre-vingts, qui en sortent désœuvrées, dégueulasses, agressives, et finissent parquées dans les ghettos poussiéreux de Johannesburg… Un banal employé de bureau, chargé du “nettoyage” de ces parasites, en pleine mutation génétique… Un tissu social déchiré par la violence et la haine… Un faux documentaire tourné caméra à l’épaule…

N’en jetons plus. District 9 ressemble à tout sauf à un blockbuster prêt à distraire les foules de leurs tourments. Son projet est même exactement inverse : nous mettre, collectivement, le nez dans la merde, dans le bordel du présent. L’apartheid ? Une réalité persistante, mais sous des formes nouvelles. Obama et la société “postraciale” ? Une vaste blague. Un programme anxiogène, une noirceur dans l’analyse des rapports de domination (Blancs/Noirs ; Nord/Sud), une volonté de critique politique ultramarquée propre à faire flipper le moindre boss de studio à Hollywood ou ailleurs. A tort.

Car District 9, en plus d’être un film intéressant, cartonne. Depuis le 14 août, le premier long métrage de Neill Blomkamp, un jeune inconnu de 29 ans spécialisé dans les effets spéciaux, les clips et la publicité, a rapporté aux Etats-Unis plus de trois fois ce qu’il avait coûté, augurant d’une carrière mirifique pour son créateur. Décryptage de la recette miracle de District 9 à travers son témoignage.

Peter Jackson, parrain de prestige

Auréolé du triomphe de sa trilogie du Seigneur des anneaux, Peter Jackson se croyait assez puissant pour faire exister un film avec, comme seuls arguments, son désir et son intuition. Revêtant sa panoplie de producteur, il avait prévu d’installer un gamin aux commandes de l’onéreuse adaptation cinéma du mythique jeu vidéo Halo. Ce kid s’appelait Neill Blomkamp.

Rencontré au dernier Festival de Deauville, l’intéressé raconte pourquoi tout a commencé et comment tout aurait pu s’arrêter. “Après avoir repéré l’une de mes demos, Peter Jackson, qui cherchait un réalisateur pour Halo, m’a fait venir dans son studio en Nouvelle-Zélande. C’était en août 2006. J’avais 26 ans. Il a traîné avec moi pendant une semaine pour voir si j’étais la bonne personne. Il a trouvé que oui… Mais au bout de cinq mois, le projet a capoté. J’avais déménagé de Vancouver où j’habite depuis mon adolescence, je m’apprêtais à y rentrer, hyper déçu. Mais Peter ne m’a pas laissé repartir. Le jour d’après, il m’a proposé de réaliser un film dont il serait le producteur. Son approche : “On va le monter avec peu d’argent, tu pourras imaginer un truc dingue, en toute liberté.”

Quelques semaines plus tard, Blomkamp entamait l’adaptation de son court métrage Alive in Joburg, qui allait se transformer en District 9. Sans contraintes, comme prévu. “Franchement, travailler avec Peter Jackson, c’est vivre dans un monde idéal où tes idées sont protégées, rigole le petit veinard. Par exemple, il était important pour moi que le film se tourne dans l’une des parties les plus déshéritées de Soweto. Peter n’a jamais hésité à me donner le feu vert.

Jackson s’est fait plutôt discret durant le processus de fabrication, mais sa présence au générique a largement contribué au buzz autour de D-9 depuis un an. Une leçon de marketing viral à coups de teasers et de bandes-annonces minimales, simplement relayés par une campagne d’affichage reprenant astucieusement des codes graphiques présents dans le film. Résultat : l’internet chauffé à blanc a aidé au succès de District 9, comme cela avait été le cas pour un autre film-concept adoubé par la toile, Cloverfield.

Prophétie politique

Pourtant, D-9 se démarque de ses cousins (dans la famille des outsiders à succès fondés sur l’esthétique du faux reportage, on pourrait aussi évoquer The Blair Witch Project) par sa manière singulière de retrouver l’énergie longtemps perdue des séries B politiques 80’s – celles de John Carpenter et des premiers David Cronenberg. Blomkamp est-il conscient que son film prend la suite ?

J’aime beaucoup Carpenter, Cronenberg et aussi Verhoeven. Pourtant, quand j’ai vu leurs films, comme The Thing ou Robocop, je n’étais pas assez âgé pour en saisir la portée politique. C’est en grandissant que j’ai compris à quel point la science-fiction pouvait occuper cette fonction. Mais je ne peux pas dire que j’ai été influencé. Je suis avant tout dirigé par des envies visuelles, c’est là que mes films commencent, pas avec des idées. Si je devais en avoir, mes modèles seraient plutôt James Cameron, pour sa façon personnelle d’utiliser la technologie, Ridley Scott, pour son œil extraordinaire, et Kubrick, parce qu’il a poussé le cinéma à bout.”

Sur la question de l’engagement, le discours politique de Blomkamp en tant que personne reste paradoxalement aussi souterrain que celui de District 9 éclate au grand jour. Une stratégie pour éviter les ennuis ? “Le film ne délivre aucun message, je ne crois pas que le cinéma puisse changer quoi que ce soit”, assène le jeune homme avec aplomb. La vision si pessimiste des rapports raciaux et sociaux développée par le film est-elle un simple gadget scénaristique ? Tout de même pas.

Le geste le plus fort du film est peut-être le transfert d’identification qu’il opère des êtres humains vers les aliens. Certes, il y avait déjà eu les zombies émouvants de Romero. Mais le point de vue dominant restait encore celui des humains. Ici, plus le film avance et plus il épouse celui des aliens, les êtres humains ne sont progressivement plus que des cibles ou des assaillants. Jusqu’à ce dernier plan sidérant, qui parvient à transformer une gueule de crevette en la chose la plus humaine qui soit : un gros plan de visage, supposément ravagé par l’émotion. La faillite de l’humain, c’est le sujet profond du film. “Ce qui m’intéresse, c’est le destin de la planète et du genre humain, raconte Blomkamp. Ma vision des cent prochaines années n’est pas bonne. Je pense que tout pourrait s’écrouler et cela fait forcément son chemin dans le film. La population augmente de manière exponentielle tandis que les ressources diminuent. Les êtres humains sont comme tous les mammifères, ils protègent les leurs. En plus, ils ramassent autant d’argent qu’ils peuvent. On est la seule espèce capable de se détacher de l’animalité, mais on n’y arrive pas vraiment…”

Souvenirs d’enfance

Un conseil : si vous voulez partir en Afrique du Sud pour les vacances, ne comptez pas sur District 9 pour vous donner envie ou sur Neill Blomkamp pour servir de guide. Le jeune homme est né en Afrique du Sud, mais l’a quittée avec sa famille à l’âge de 18 ans pour s’installer à Vancouver. Cette donnée biographique n’est probablement pas étrangère à la force du film.

Le choix de faire atterrir les aliens à Johannesburg n’est pas simplement un concept original, une astuce pour transformer un film d’aliens en parabole politique. Le film est aussi le retour d’un cinéaste sur les lieux de son enfance, un territoire qu’il connaît parfaitement, pour lequel il ne nourrit aucune nostalgie mais qui a suffisamment structuré sa vision du monde et son imaginaire pour qu’il y retourne dès qu’on lui a confié une caméra entre les mains : “L’Afrique du Sud est un putain d’endroit craignos. J’y suis retourné sans cesse depuis notre départ en 1997 – ma mère voulait que mes jeunes sœurs et mon petit frère ne grandissent pas dans la violence. Depuis, je suis allé dans les townships à Soweto plusieurs fois et le pays m’intéresse de plus en plus. Mais ce ne sont pas mes souvenirs que je filme dans District 9 : c’est une vision actuelle de l’Afrique du Sud. Le film ne parle pas uniquement d’une réalité locale. Les personnes déplacées, les disparités économiques grandissantes, la xénophobie, cela pourrait tout aussi bien se passer en Israël et Palestine, ou pendant des émeutes à Paris. Sauf que si vous voulez être aux premières loges pour le futur, allez en Afrique du Sud. Si vous voulez voir Paris dans soixante ans, allez à Johannesburg.” On y pensera.

Génération YouTube, et après

Neill Blomkamp a de réelles convictions sur le chemin à suivre pour un jeune cinéaste des années 2010. En ce moment, par exemple, le protégé de Peter Jackson éconduit un à un les studios US qui lui proposent de réaliser le prochain gros film d’action. “J’adore Hollywood, je n’ai aucun dédain, mais j’aime encore plus avoir le contrôle créatif sur mon travail. Je refuse qu’on me dise quoi faire parce qu’une famille du Kansas sert de mètre étalon. Alors, je me dirige vers des budgets maîtrisés. Je veux assez d’argent pour réaliser mes envies, mais pas au point de risquer ma liberté.”

Logiquement, District 9 devrait connaître une descendance, mais pas une suite à proprement parler. “Je vais faire un autre District 9, en différent ! On y parlera aussi d’enjeux politiques contemporains dans une atmosphère de science-fiction, mais le film sera situé sur une autre planète. J’ai écrit un synopsis de quatorze pages et signé un contrat. Je veux tourner en 2010.”

Refuser de devenir la nouvelle star avalée par le système, mais surfer sur la vague de son succès sans états d’âme : Neill Blomkamp représente la nouvelle génération des golden boys du cinéma mondial pour qui le pragmatisme s’impose comme la meilleure façon de maintenir un cap, sans se fixer de limites. Une génération qui baigne dans la nouvelle donne (numérique, 3D, etc.) et devrait aisément régner sur la prochaine décennie. “Pour moi, la 3D et le numérique sont complètement naturels. J’appartiens à la première génération qui peut dire cela. Je vais aussi sur YouTube tout le temps et cela influence mon regard. Mais il existe une nouvelle génération, plus jeune, qui réfléchit à la façon de combiner le jeu vidéo et le cinéma. La disparition lente du “cinéma passif” et l’arrivée du “cinéma/gaming ”interactif me semble la prochaine étape. Je ne sais pas à quoi cela va ressembler. Pour l’instant, je vais me contenter de ne pas rester enfermé dans un style. Je ne ferai pas tout le temps des films caméra à l’épaule avec une image cradingue. Mon but est de ne jamais rester à la même place.” 

Publicité
Commentaires
Le blog de la famille
Publicité
Catégories
Publicité